crédit bancaire
Ce n’est un secret pour personne, les banques marocaines sont assoiffées de liquidités. Ce qui ne manque pas d’impacter leurs missions principales qui est le soutien au tissu entrepreneurial. Si les grandes entreprises sont privées d’accompagnement financier pour mettre sur pieds leurs projets de développement en raison notamment de la hausse du coût du risque, qu’en est-il des petites et moyennes entreprises? Les PME ont depuis toujours souffert d’un accès limité au financement bancaire, une situation qui risque d’empirer si le coût du risque continue à monter. Les PME déclarent en effet souffrir d’un durcissement des conditions d’octroi de crédit et le crient haut et fort. «Les banques ne veulent plus accomplir leur rôle de prise de risque», soutient Salaheddine Kadmiri, président de la Commission PME à la CGEM. Cette frilosité s’explique par le fait que «le système bancaire marocain est bâti sur le concept du zéro risque», témoigne Mohammed Naciri, manager à Coach Consulting et conseiller financier auprès de l’agence nationale pour la promotion de la petite et moyenne entreprise (ANPME).
En clair, le durcissement n’est qu’une conséquence directe de la baisse de l’épargne. Il est accentué par le taux d’intérêt à la source, qui reste assez élevé, en comparaison avec d’autres pays. En effet, il se situe aux alentours de 3,5%, alors qu’en France par exemple, il ne dépasse pas 1%. Du côté du patronat, l’on affirme que plusieurs tentatives ont été menées auprès du GPBM pour obtenir le maintien du coût du financement, sanspour autant décrocher de promesse ferme. Pour rappel, le taux d’intérêt qui avoisinnait 15% a atteint 6% actuellement. «Nous militons pour maintenir ces taux, en dépit de la crise financière et de la baisse de l’épargne», commente Kadmiri. Il admet néanmoins que «pour le moment, ce sont les seules revendications que nous pouvons présenter au GPBM. Autrement dit, nous ne pouvons imposer aux banques de financer les PME, car elles restent avant tout des établissement privés». Pour soutenir les PME en termes de financement, les banques marocaines demandent de nombreuses garanties, qui peuvent aller jusqu’aux cautions personnelles. En réalité, la responsabilité est partagée. Elle incombe certes aux banques qui cherchent à s’éloigner au maximum du moindre risque mais aussi aux PME qui pêchent par leur manque de transparence, principal grief qui leur est reproché et qui leur permettrait probablement, s'il était dépassé, de regagner la confiance des banques.
Plusieurs PME, en effet, ne sont pas structurées et tiennent des comptes «maquillés», ce qui suscite la méfiance des banques. Actuellement, il n’est pas exagéré de dire que l’écrasante majorité des moyennes et petites entreprises marocaines ne justifient pas d’une stratégie formalisée et déployée sur le long terme. Pis encore, «il ne suffit plus d’avoir une stratégie sur papier, il faudrait également la déployer», souligne Naciri. Autrement dit, «l’entreprise doit décliner les objectifs à atteindre d’une manière précise et réaliste». C'est un avis qu’épouse Kadmiri, pour expliquer le fait qu’en l’absence d’une stratégie de développement concrète, le banquier ne peut courir le risque de financer une entreprise qui manque de visibilité. Le deuxième point qui ne joue pas non plus en faveur des PME marocaines, est relatif à la budgétisation, une donne à propos de laquelle Mohamed Naciri s’alarme: «Même lorsqu’elles le font, les entreprises budgétisent mal». «Il y a énormément d’aspects qu'elles laissent de côté, ou qu’elles oublient carrément», ajoute-t-il. Actuellement, il y a une sorte d’incohérence entre les documents présentés par la PME à l’établissement de financement. Il faut savoir aussi que les banques se basent non seulement sur le bilan pour accorder le financement, mais également sur le budget et sur la stratégie future. En somme, les bilans maquillés, les budgets qui ne reflètent pas la réalité et l’absence de réflexe stratégique, présentés par certaines entreprises, sont autant de problèmes qui décrédibilisent les PME vis-à-vis de leur banquier et poussent ce dernier à fermer le robinet du crédit.
Point de vue: Youness Bennani, Directeur général de Jet Finances
Les difficultés d’accès au financement bancaire représentent un réel handicap vers le développement des PME marocaines. Ces dernières ne doivent pas se contenter des crédits bancaires et sont appelées à chercher de nouveaux moyens de financement, qui leur permettront de déployer de la manière la plus efficiente et la plus efficace leur business. À mon sens, il existe d’autres moyens qui semblent plus adaptés à la structure des PME. Il y a notamment un moyen de financement peu connu qui est le fonds d’investissement. Ce dernier a pour objectif d’ouvrir provisoirement une partie du capital social, selon certains critères d’éligibilité de l’activité de l’entreprise, du réel potentiel de croissance, du taux du risque encouru, et de la durée de l’investissement. Ces moyens de financement sont le plus souvent spécialisés suivant l'objectif de leur intervention. À titre d’exemple, il y a le fonds de capital-risque, le fonds de capital développement et le fonds de LBO. Ces derniers correspondent à des stades différents de maturité de l'entreprise, pour l’accompagner dans les phases de développement, voire même en amont, au niveau de leurs phases de démarrage.